Martin Kobler: en RDC, «c’est la fin de la guerre mais maintenant il faut gagner la paix»

Au Congo, les civils, eux, n'ont qu'une hâte: retourner chez eux pour y vivre en paix. A Kibumba, au nord de Goma, le 27 octobre 2013.

Au Congo, les civils, eux, n’ont qu’une hâte: retourner chez eux pour y vivre en paix. A Kibumba, au nord de Goma, le 27 octobre 2013.

REUTERS/Kenny Katombe

Voilà un peu plus de cent jours que Martin Kobler a pris la tête de la Mission de l’ONU pour la stabilisation de la République démocratique du Congo (Monusco). Après la défaite du Mouvement du 23 Mars (M23), quelles sont les nouvelles priorités de la force de l’ONU en RDC ? Que faut-il faire des combattants qui rendent les armes ? Que va faire la Monusco contre les autres groupes armés qui agissent dans l’est congolais et faut-il absolument que les négociations des Kampala aboutissent ? Eléments de réponse avec Martin Kobler.

RFI : Après un peu plus de 100 jours à la tête de la Monusco, le M23 a été défait militairement. Mission accomplie, mission terminée pour vous ?

Martin Kobler : Naturellement pas. Avec la défaite du M23, le travail commence parce qu’on a d’autres groupes armés, le FDLR [Forces démocratiques de libération du Rwanda ndlr), l’ADF [Forces démocratiques alliées ndlr]. Il y a 50 groupes maï-maï, ici, dans la région de l’est du Congo, donc ce n’est pas seulement le M23. Deuxièmement, dans les territoires libérés, il faut restituer l’autorité de l’Etat, maintenant, conjointement avec le gouvernement congolais. C’est la fin de la guerre mais il faut gagner la paix maintenant.

Mais est-ce que vous allez pourchasser les autres groupes dont vous parlez, notamment les FDLR ?

On ne parle pas de chasser. On parle de stratégie militaire et aussi de combat. Mais le premier choix, c’est le désarmement paisible. Des centaines de gens nous ont dit, sans que nous combattions, « nous voulons un désarmement volontaire ». Nous encourageons le désarmement volontaire et paisible sans combattre parce que nous ne voulons pas combattre. Mais nous utilisons la force, la brigade d’intervention, si c’est nécessaire, si les groupes armés ne veulent pas désarmer volontairement et paisiblement.

Combien de groupes se sont rendus jusqu’à présent ?

Nous avons des FDLR, ce ne sont pas des groupes qui se rendent ; ce sont des partis de groupes des maï-maï qui ont offert de désarmer volontairement. Nous avons une centaine de personnes dans notre groupe de DDR Désarmement-démobilisation-réintégration. On est en train maintenant d’avoir d’autres camps et nous encourageons les défections et le désarmement volontaire.

Le gouvernement congolais a annoncé mercredi 20 novembre un plan de désarmement des anciens membres des groupes armés. Ce plan vous paraît-il crédible ?

Il faut faire plus vite parce que maintenant on a une horde de gens qui veulent désarmer, mais on n’a pas un programme de réintégration. Et c’est nécessaire, maintenant, au sein du gouvernement, de présenter un plan de ce qu’on appelle « DDR, désarmement-démobilisation-réintégration ». Beaucoup de gens désarment, ils sont démobilisés, mais que faire ensuite ? On ne peut pas les laisser dans les camps. Il faut du travail, il faut les renvoyer peut-être dans les forces armées congolaises, peut-être dans les coopératives agricoles. Il faut créer, pour eux, des projets, parce que s’ils restent dans les camps de désarmement-démobilisation, on peut le faire pour un mois mais pas pour toujours.

Le chef de guerre Tcheka qui dirige une milice dans l’est de la RDC redemande son intégration dans l’armée congolaise. Que faut-il lui répondre d’après vous ?

On encourage les combattants de Tcheka de désarmer volontairement, mais pour Tcheka lui-même l’intégration ne se pose pas. Je crois que c’est un criminel. Il a commis des crimes de guerre, de recrutement d’enfants soldats, des crimes sexuels. Pas d’impunité, pas d’amnistie.

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La signature à Kampala d’un accord entre le gouvernement et le M23 est toujours nécessaire d’après vous ?

Oui. Le problème du M23, maintenant, est résolu militairement. Mais le problème ne disparaît pas. Les gens sont là, ce sont les Congolais, ils doivent rentrer dans leur propre pays. Il faut trouver une procédure. Maintenant, c’est justement la question de résoudre le problème, si c’est un accord, une déclaration, des conclusions. Je suis très confiant parce qu’on n’a pas de différences en substance. On va résoudre le problème.

N’est-ce pas pour satisfaire l’Ouganda et le Rwanda que vous poussez à la signature d’un accord ?

Non ! La question est qu’on a des réfugiés, qu’on a des déplacés internes, qu’on a maintenant les ex-combattants du M23 qui sont en Ouganda. Que faire avec ces gens ? Nous voulons une paix durable, pas une paix pour seulement un mois. Il faut maintenant avoir une situation irréversible.

Mercredi 20 novembre s’est ouvert le procès d’une quarantaine de militaires congolais accusés d’avoir commis des viols massifs à Minova, dans l’est de la RDC. Etes-vous satisfait par le travail effectué jusqu’à présent par la justice militaire congolaise ?

On a beaucoup insisté sur ce procès de Minova. C’est un bon développement qu’il y ait maintenant ce procès. Mais nous avons des doutes sur la légalité, la constitutionnalité de la cour parce qu’on n’a pas le droit à un recours, dans cette procédure. Il faut respecter l’Etat de droit d’avoir des cours qui sont constitutionnelles. On observe très étroitement.

Source: RFI

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