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Ex-M23 : La farce d’une nouvelle dissidence

18/11/2013 12:24:00KongoTimes!


Bertrand BISIMWA

 N’attendant rien des conclusions de Kampala, quelle que soit leur contenu ou sa dénomination, les agresseurs de la RDC veulent relancer la stratégie RCD – CNDP pour aménager le lit pour une nouvelle rébellion. Serge Kambasu Ngeve dit vouloir signer une « déclaration » selon la volonté de Kinshasa. De l’avis d’esprits éclairés, ce secrétaire permanent du M23 serait cet appât qui cacherait dans l’ombre le reste du M23 qui prendrait alors un autre nom pour relancer l’agression-rébellion à partir de l’Ouganda et de Kampala.

Il est très difficile, voire impossible, de convertir un sorcier. Ce qui se passe avec les rébellions aux mille visages à l’Est de la RDC n’est pas loin de ce cas de figure. Après 20 mois de terreur, d’assassinats, de viols et autres exactions contre l’humanité, le Mouvement du 23 mars, pourtant défait, ne songe nullement à disparaître. Tout, dans l’esprit de ses animateurs, indique que ce mouvement va très bientôt connaître une mutation pour relancer une nouvelle phase de rébellion, et non une nouvelle rébellion tout court.

La farce d’une nouvelle dissidence

Hier, à la surprise générale, Serge Kambasu Ngeve, secrétaire permanent du M23, qui se présentait comme chef de l’équipe des négociateurs de ce mouvement rebelle a annoncé sa disponibilité, ainsi que celle d’un groupe qu’il dit « majorité » de la branche politique de son mouvement, à signer le texte de Kampala dans les termes exigés par le Gouvernement. « Nous refusons d’être pris en otage par une minorité de personnes qui bloquent l’aboutissement du processus de paix », a-t-il laissé entendre, faisant semblant de s’en prendre à son propre camp, du moins, à « certains de nos camarades » qui « tiennent mordicus au terme « accord de paix ».

Autre stratagème, Kambasu fait croire qu’en acceptant de signer le texte selon les termes de Kinshasa, c’est une manière, pour lui et son groupe, de s’aménager un nouvel avenir. « Ce jeu de vocabulaire, certes avec des implications politiques, ne peut, en aucun cas, conduire à un suicide collectif pour notre organisation et des milliers des membres qui la composent », a-t-il déclaré avant de poursuivre ; « si nous ne concluons pas les pourparlers de Kampala, qu’allons-nous devenir ? ».

Quant au sort du reste des troupes disséminées entre le Rwanda et l’Ouganda, Kambasu est catégorique. Il exige une « amnistie et réintégration dans l’armée ou réinsertion dans la vie civile ».

Démarche sincère ou nouveau piège contre le Gouvernement. Toujours hier, les autres bonzes du M23 ont donné de la voix pour exprimer un discours plutôt contraire, du moins selon les apparences. Bertrand Bisimwa et Sultani Makenga ont convergé dans la réclamation de la signature d’un « accord » politique en faisant ressortir leur propos d’une menace à peine voilée. Si cette signature n’intervient pas, ou si cela se fait partiellement, les conditions seront réunies pour la résurgence d’une autre rébellion plus tard.

Cette menace n’est pas fortuite, elle résume, en fait, l’état d’esprit même des rebelles et leurs soutiens rwandais et ougandais. En effet, alors que Federico Major, ancien Directeur de l’Unesco, recommande de combattre la violence dans les esprits des hommes puisque c’est là qu’elle naît, avec les agresseurs de la RDC, aucun accord ne conduira à une paix réelle à l’Est de la RDC et dans la région des Grands Lacs tant que les esprits ne seront pas pacifiés. Cette réalité ramène une autre à la surface : la fameuse racine des conflits récurrents qui donnent prétexte aux rébellions tout aussi récurrentes n’a jamais été exprimée ouvertement, ni par les insurgés-rebelles-agresseurs, ni par la communauté internationale qui pousse à un règlement politique sous prétexte que c’est par cette voie que l’on raserait cette fantomatique racine.

La réalité est connue, pourtant : le plan de balkanisation de la RDC n’a jamais été rejeté. L’enjeu, à l’Est, est l’aménagement, par les multinationales, d’espaces pour l’exploitation des ressources de la RDC avec la bénédiction de leurs pays respectifs.

Le schéma RCD – CNDP relancé

Ce faisant, l’on constate que le nouveau manège du semblant de dissidence n’est pas une nouvelle trouvaille : nous sommes en train d’assister à un remake de la stratégie du RCD (Rassemblement congolais pour la démocratie), après Sun City jusqu’à la naissance du CNDP. Azarias Ruberwa gagne Kinshasa, tandis que Nkunda, Mutebusi et autres Bosco Ntaganda s’oppose, non pas à une réintégration dans l’armée, mais à tout déplacement de l’Est du pays. Face à l’obligation de la puissance publique de faire son travail d’étendre l’autorité de l’Etat, une insurrection éclate et aboutit à la naissance du CNDP, et on connaît la suite.

Il faut dire qu’il n’est plus question, pour les Congolais, de retomber dans ce nouveau piège. De toutes les manières, les données du terrain aujourd’hui ne sont plus les mêmes que celles d’hier. Après Sun City, en effet, le RCD – CNDP avait l’avantage d’être présent sur terrain pour en assurer le contrôle dès le déclanchement des hostilités. Cette fois-ci, c’est l’armée régulière qui occupe les mêmes positions. Ce qui va certainement amener à une autre stratégie qui se déploie déjà sous nos yeux.

Plan B : infiltrer de nouveau les institutions pour relancer le schéma M23

En effet, à défaut de se relancer sur les champs des opérations en territoire congolais, le M23 et ses soutiens peuvent toujours tenter d’infiltrer le camp gouvernemental à travers cette offre de Serge Kambasu Ngeve. Entre-temps, le reste du M23, branche armée comme branche politique, se réorganise pour continuer à déstabiliser la RDC avec des incursions au départ du Rwanda et de l’Ouganda.

Ce stratagème est plausible si l’on considère l’encadrement dont les éléments du M23 ont bénéficié à leur arrivée en Ouganda. Ici, ont clairement indiqué les autorités ougandaises, ils ne sont nullement des prisonniers. Kampala dit les garder en attendant de savoir comment l’accord attendu réglera leur sort. Mensonge, puisque c’est l’Ouganda qui assure la facilitation des pourparlers, et détient le projet de l’acte à signer. De ce fait, Kampala en connaît le contenu et connaît donc le sort de ses protégés.

Déjà, on a appris que Sultani Makenga est en train de réorganiser un groupe de rebelles pour relancer les opérations. Sultani Makenga a, en effet, quitté Kampala hier mercredi 13 novembre pour Kasese où il est allé inspecter réorganiser 348 éléments M23 qui se sont rendus dans cette région ougandaise, avant de lancer l’offensive.

Sur un tout autre volet, on peut, dans une certaine mesure, considérer que Kambasu et les siens, qui seraient des Congolais authentique, voudraient faire dissidence pour rejoindre le camp de la patrie afin d’échapper à la vie des camps de réfugiés qui sera certainement leur sort. Ils seraient donc conscients qu’en tant que membre de la direction politique du M23, ils seraient frappés de la non admission à l’amnistie, tandis qu’en externe, ils s’exposeraient à toutes sortes d’insécurité.

Dans tous les cas, il revient aux Congolais d’ouvrir l’œil, et le bon, car l’ennemi n’a pas désarmé. Il est loin, alors très loin de le faire.

[Pascal Debré Mpoko]
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