«Joseph Kabila» au service de la sécurité du Rwanda de Kagamé

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Par ukase de «Joseph Kabila», mille quatre cents combattants des FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda) – qui ont accepté de déposer les armes – accompagnés de quatre mille deux cents membres de leurs familles vont être transférés, des provinces du Nord et Sud Kivu, à Kisangani (Province Orientale) avant leur installation «provisoire» à Irebu, tout près de Bikoro, dans la province de l’Equateur. Cette question qui touche à la sécurité nationale n’a pas fait l’objet de délibération du Conseil des ministres. Elle n’a pas non plus été évoquée par les deux chambres du Parlement. A preuve, les protestations des parlementaires de la Province Orientale et de l’Equateur. L’éloignement de ces opposants au régime de Paul Kagame des frontières de leur pays a le mérite de «démasquer» un «Kabila», qui fait de moins en moins mystère de sa loyauté vis-à-vis du Rwanda que du Congo-Kinshasa qui lui a sorti du néant et tout donné. Le cas sous examen n’est pas le premier du genre.

«Contrairement aux apparences, Joseph Kabila est un trouillard. Il a une peur bleue de son mentor Paul Kagame. La preuve a été faite le 30 juin 2010 lorsque le démarrage de la parade militaire à Kinshasa a été retardée de plusieurs heures parce que Paul Kagame avait quitté Kigali avec deux heures de retard». L’homme qui parle est un diplomate d’un pays occidental en poste à Kinshasa. Il ajoute : «Joseph Kabila n’a pas oublié qu’il a foulé le sol du Kivu, en octobre 1996, en qualité d’aide de camp et de chauffeur du colonel James Kabarebe, l’actuel ministre de la Défense du Rwanda. Les dirigeants rwandais exercent du chantage sur lui. Fidèle vis-à-vis de ses mentors rwandais, Joseph Kabila n’a pas oublié les services lui rendus par certains leaders des FDLR d’où les atermoiements actuels». A en croire ce diplomate, c’est encore «la peur» qui aurait incité le «raïs» à convoquer les ambassadeurs le 31 mai pour dénoncer les «ingérences». «Kabila Kabange avait péter les plombs ce samedi 31 mai».

Selon le général Abdallah Wafy, représentant spécial adjoint du secrétaire général de l’Onu en charge des opérations dans la partie orientale du Congo, les 1400 miliciens Hutus rwandais «ayant accepté de déposer les armes» arriveront «prochainement» à Kisangani au lieu-dit «Centre technique de Bataillons». Il semble que «Boyoma» ne sera qu’un lieu de «transit». La prochaine destination – finale ? – serait la localité d’Irebu, à l’Equateur en attendant de trouver un « pays d’accueil ». «C’est à croire que le chemin le plus court pour aller des provinces du Kivu vers le Rwanda passe par Kisangani et Mbandaka», s’enrage un activiste de la société civile joint au téléphone mardi à Kisangani.

A Kinshasa, le général Wafy a indiqué l’itinéraire : Walungu-Bukavu (Sud-Kivu), puis Kisangani (Province Orientale) et Irebu via Mbandaka (Equateur). A partir de cette dernière province, «on» va leur chercher un hypothétique pays d’accueil. Motif de cette errance : Paul Kagame rechigne à voir l’ombre d’un «Interahamwe» aux frontières de son pays. Le Congo-Kinshasa est-il en passe de se transformer en réceptacle des tous les flibustiers et autres pistoleros de l’Afrique centrale?

Selon des indiscrétions dans la capitale congolaise, la décision de délocaliser les éléments des FDLR n’a jamais fait l’objet d’un débat au cours des rares réunions de Conseil des ministres. Au palais du peuple, siège du Parlement, personne n’a souvenance d’une discussion en plénière ou en commission sur cette question afin d’apprécier les avantages et les inconvénients. «Politiquement irresponsable, Joseph Kabila a toujours été le véritable conducteur de la politique de la nation usurpant une prérogative du premier ministre sans rendre compte à la représentation nationale», commente un député national de la majorité présidentielle. L’homme a requis l’anonymat. Et d’ajouter : «Il est inacceptable que le chef de l’Etat exerce un pouvoir sans contrôle ni limite. Il décide impunément sur tout avec une sorte de gouvernement parallèle qui se trouve à la Présidence. La raison est simple : la grande majorité des députés et sénateurs sont ses obligés». «La délocalisation des FDLR à Kisangani et à Irebu ne répond à aucun intérêt national», souligne-t-il.

Réactions

Lundi 14 juillet, le comité des députés nationaux de la Province Orientale ont fustigé le transit de ces miliciens dans leur région en invoquant des «raisons de sécurité». Président de ce comité, Valentin Senga, membre de la mouvance kabiliste, a été sans équivoque : «Nous refusons catégoriquement le transit et la localisation des éléments FDLR sur toute l’étendue de la Province Orientale».

Notons que des bandes armées nationales et étrangères imposent leur loi dans certaines localités des districts du Bas et Haut-Uélé. C’est le cas des Mbororo et ADF-Nalu. Sans omettre les combattants fidèles au fameux « Cobra Matata » et ceux de l’ex-chef milicien Paul Sadala, alias « Morgan », exécuté en avril dernier par les FARDC. Pour les députés de la Province Orientale, les éléments des FDLR doivent être rapatriés «vers leur pays le Rwanda». Seront-ils entendus ? Rien n’est moins sûr dans cette Assemblée nationale truffée de caudataires prompts à exhiber la danse pour plaire au «raïs».

La même réprobation prévaut dans les milieux des élus de l’Equateur. Ceux-ci avaient donné de la voix dès le mardi 10 juin. C’était au Palais du Peuple. Ici aussi, les députés nationaux craignent une exacerbation de l’insécurité. «L’opinion tant nationale qu’international n’ignore pas les atrocités commises par ce mouvement politico-militaire à l’Est du pays. A ce point de vue, la décision du gouvernement relative à cette relocalisation n’est pas réfléchie», déclarait le président du caucus des députés de l’Equateur, Nicolas Akpanza. «Les réfugiés centrafricains se trouvent nombreux sur le sol de notre province, avec des conséquences négatives sur la vie des autochtones, la précarité de la situation de la province suite au dossier des insurgés Enyele, les récents expulsés du Congo Brazzaville sont pour la plupart des ressortissant de l’Equateur» expliquait-il. Même son de cloche dans les milieux des activistes de la société civile.

Des indiscrétions dans les milieux kabilistes de la capitale laissent entendre que depuis le renversement de François Bozizé par les rebelles de la Séléka, la famille de l’ex-dictateur a trouvé refuge à Kinshasa. «Les Bozizé résideraient au quartier Ma Campagne», confie une source. Il semblerait que Bozizé serait «à tu et à toi» avec François Beya, le patron de la DGM (Direction générale des migrations). Selon la même source, Bozize qui rumine l’ambition de redevenir «calife à la place du calife» à Bangui aurait des contacts réguliers avec Lévy Yakete, le leader de la milice chrétienne Anti-Balaka via un de ses proches qui ferait des vas-et-viens entre Kinshasa et Zongo. D’aucuns parlent d’un certain « Zambrota » qui se baladent au grand jour avec des membres des « services » congolais.

«Joseph Kabila» au service de la sécurité du Rwanda

Les faits parlent d’eux-mêmes. En 2005, le gouvernement de transition « 1+4″ dominé par « les hommes du président  » avait signé un accord à Rome avec des dirigeants des FDLR. Cette convention donnait aux miliciens Hutus rwandais le choix entre «l’installation définitive» – inimaginable! – dans une des régions congolaises ou le «rapatriement volontaire» au Rwanda. Les rapatriements volontaires ont été rarissimes. Paul Kagame et les « manitous » de son régime s’évertuaient à promettre des bosses et des plaies aux candidats au retour.

En mai 2010, l’opinion tant nationale qu’internationale apprenait avec stupéfaction le transfert de cinquante-quatre éléments des FDLR et des membres de leurs familles – soit au total 164 personnes – de Goma à Kisenge au Katanga. Qui a pris cette décision ? L’auteur de cette initiative intempestive est un certain Daniel Mulunda Ngoy Nyanga, président d’une obscure l’association dénommée «Parec» (Programme national pour la paix et la reconstruction). L’homme a pour signe particulier d’être le «gourou» de «Joseph Kabila». A l’époque, le ministre de la Communication et presse en l’occurrence Lambert Mende Omalanga de déclarer : «Ce transfert fait partie d’un vaste programme du gouvernement congolais qui va aboutir au retour de ces FDLR dans leur pays d’origine». «Il n’y a aucune menace pour la sécurité des populations», ajoutait-il. Quid de l’exécution de ce « vaste programme »?

En juin 2011, la presse flamande rapportait qu’à la demande de Paul Kagame, «Joseph Kabila» a entamé des pourparlers avec les leaders Hutu des FDLR. A l’ordre du jour, le transfert des combattants de ce mouvement des environs de Walikale et Masisi au Kivu vers la province du Maniema et leur désarmement. L’objectif, une fois de plus, consiste à éloigner ces opposants armés des frontières de leur pays d’origine. Les négociations étaient conduites, côté congolais, par …un officier belge nommé Jean-Pierre Breyne. Un proche au socialiste francophone André Flahaut. Breyne était assisté de Jean-Luc Kuye Ndondo, président de la Commission vérité et réconciliation, et de Père Minani. Les FDLR, eux, étaient représentés par le général Gaston Iyamuremye aka Ramuri. Les «négociations» se sont terminées en «eau de boudin», comme disent les Belges. Iyamuremye aurait posé trois conditions : le versement d’un montant oscillant entre 250 000 et un millions $ US promis à Rome en 2005 ; des négociations directes entre Paul Kagame et la milice hutue et l’arrêt de toute attaque contre les miliciens. L’homme fort de Kigali y opposa une fin de non-recevoir.

Après avoir échoué au Maniema, « Joseph Kabila » récidive dans la Province Orientale et à l’Equateur. Question : Que mijotent cet individu – au passé jalousement gardé – et les «durs» de son régime? Voudraient-ils «allumer le feu» – avant de «dégager» ? – au Sud (Ba Kata Katanga), au Nord-Est (FDLR, la nébuleuse Maï Maï, Mbororo, ADF, LRA), à l’Ouest (FDLR et Anti-Balaka) ? Pure spéculation ? Assurément pas !

L’actuel locataire du Palais de la nation est au service des intérêts sécuritaires du Rwanda de son mentor Paul Kagame et de sa propre survie politique. Il n’a que faire de la sécurité des personnes et des biens au Congo-Kinshasa. Il n’y a plus de doute : le Congo dit démocratique est dirigé par un imposteur. Depuis treize ans.

BAUDOUIN AMBA WETSHI/CI

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