GLPOST

Rwanda: Les Etats-Unis plaident pour l’ouverture d’un dialogue dans la région des Grands Lacs

Russ Feingold
Par RFI

Après avoir rencontré, cette semaine, le président rwandais, Paul Kagame, l’envoyé spécial des Etats-Unis pour les Grands Lacs, Russ Feingold, se trouve actuellement à Paris où il participe au Sommet paix et sécurité de l’Elysée et où il rencontre des chefs d’Etat de la région. Il s’est entretenu, ce vendredi 6 décembre, avec les présidents ougandais et tanzanien, Museveni et Kikwete. Samedi, il devrait rencontrer le président de la République démocratique du Congo, Joseph Kabila et le président congolais, Denis Sassou Nguesso, entre autres. Son objectif est de les convaincre de la nécessité d’ouvrir un dialogue régional sur la base de l’accord cadre d’Addis Abeba. Russ Feingold répond aux questions de Sonia Rolley.

RFI : Pensez-vous qu’un accord va finalement être signé entre le M23 et le gouvernement congolais ?

Russ Feingold : Je pense qu’un document concluant les pourparlers de Kampala sera signé dans un futur proche. Cela nous permettra d’aller de l’avant et régler plusieurs problèmes comme trouver une solution pour les combattants du M23 qui, pour la plupart aujourd’hui, se trouvent dans des pays étrangers, ou encore obliger ceux qui ont commis des crimes de guerre de rendre des comptes. Et je suis optimiste sur la conclusion prochaine de ces pourparlers.

Aujourd’hui, d’autres groupes armés comme les FDLR demandent eux aussi à ce que des discussions politiques soient ouvertes avec leur propre gouvernement. Pensez-vous que c’est souhaitable ?

Le président Museveni a appelé à l’ouverture des pourparlers de Kampala, suite à l’offensive du M23 l’an dernier. Le gouvernement congolais a accepté mais ce que je pense, c’est que pour régler le problème des autres groupes armés, il faut soutenir la Monusco mais aussi l’armée congolaise dans leurs efforts pour éliminer ces groupes qui sont des groupes armés illégaux.

Beaucoup d’entre eux ont commis des crimes très graves. Maintenant si un groupe armé veut se rendre ou si certains de ses membres veulent faire défection, nous les encourageons à le faire et nous pouvons les aider. Je ne pense pas que la solution soit que chaque gouvernement commence à négocier avec un groupe armé particulier. Si un dialogue doit s’ouvrir, il faut que ce soit entre les pays de la région. Les groupes armés n’ont pas leur place à cette table. Les pays, oui.

Ce pourquoi vous plaidez, c’est pour l’ouverture d’un dialogue régional ?

L’accord-cadre d’Addis Abeba a été signé sous l’égide de l’Union africaine et de l’ONU, en février dernier. Onze pays africains l’ont signé mais nous avons besoin d’un dialogue plus large qui, bien sûr, inclurait ce qu’on appelle les pays des Grands Lacs : la RDC, le Rwanda, l’Ouganda et peut-être le Burundi. Toutefois, d’autres pays comme la Tanzanie et le Congo Brazzaville pourraient être intéressés.

Ils pourraient aussi participer à ces discussions puisqu’elles devraient inclure – si nous parvenons à lancer cette initiative – des problématiques comme celles des groupes armés ; les questions de frontière mais aussi des thématiques qui concernent la région dans son ensemble comme par exemple la question des opportunités économiques qui pourraient naitre non seulement pour l’est du Congo mais aussi pour toute la région des Grands Lacs.

Ce que je suggère – et j’espère que les pays de la région le souhaiteront aussi – c’est que à partir de l’accord-cadre, il y ait de sérieuses discussions qui permettront de trouver des solutions pour les causes profondes du conflit, comme par exemple le fait que les réfugiés ont peur de rentrer chez eux. Il y a des tensions ethniques dans l’est du Congo qui ne vont pas être réglées par les pourparlers de Kampala ou simplement par la signature d’un bout de papier. Il faut que les parties soient représentées au plus haut niveau, négocient directement sous l’égide de l’accord-cadre. Et cette sorte de dialogue pourrait être la meilleure option.

Il y a déjà des organisations régionales ou sous-régionales dont ces pays sont membres. Ne craignez-vous pas de les affaiblir en créant des structures parallèles de dialogue ?

On ne va pas les affaiblir parce qu’elles le feront elles-mêmes. Ce dialogue ne serait pas piloté par l’ONU ou par un pays extérieur mais ce qu’on peut espérer, c’est qu’il le soit par la CIRGL ou par la SADC. Donc elles seront celles qui diront : c’est cela que l’on doit faire.

Certains problèmes sont régionaux par nature – comme les problématiques frontalières et les tensions ethniques – mais d’autres sont des problèmes internes comme la nécessité, pour la République démocratique du Congo, de lancer des réformes dans des secteurs clefs pour avoir un système démocratique plus efficace ou encore des élections dont les résultats soient respectés, mais aussi la réforme de l’armée. Vous ne pouvez pas avoir un espace sécurisé pour les populations dans l’est du Congo sans avoir une force armée crédible et respectée. I

l y a eu des améliorations, ces derniers temps, mais beaucoup reste encore à faire pour donner l’impression aux populations – mais aussi aux Etats de la région – qu’il s’agit d’une zone bien gérée d’un point de vue militaire. C’est pourquoi on doit se souvenir qu’il faut non seulement un dialogue régional – comme celui dont je parle – mais aussi des réformes entreprises en République démocratique du Congo.

Exit mobile version