M23
Les Forces armées de la RD Congo (FARDC) ont récupéré depuis plusieurs jours, quelques trois cents tonnes d’armement et munitions du Mouvement rebelle M23, abandonnés sur la colline de Tchanzu, située à quelque 20 km de la frontière ougandaise. L’arsenal comprend un obusier nouvelle version à longue portée, des mitrailleuses ainsi que des milliers de caisses de munition. Jeudi 7 novembre, une mission des conseillers militaires des ambassades partie de Kinshasa, a foulé le sol de l’ancien fief du M23 pour constater les moyens utilisés par les rebelles. Reportage.
Il est 6h45, lorsque le charter, un Boeing de la compagnie aérienne ITAB, décolle du tarmac de l’aéroport de N’Djili. A l’intérieur de l’avion, une dizaine d’attachés militaires des ambassades en RD Congo. Aux côtés de ces diplomates, plus d’une quinzaine de journalistes aussi bien des médias officiels que privés de Kinshasa. Deux heures et demies auront suffi pour que l’avion se pose sur le tarmac de l’aéroport de Goma. La température au sol est de 22°C. Devant le salon arrivée VIP, tout le dispositif de transport est en place. Les officiers de la Monusco embarquent dans deux hélicos. Les autres membres de la délégation prennent la route. Immédiatement, le cortège s’ébranle sur l’unique voie qui relie Goma à Kisangani. Destination : la très célèbre et historique colline de Tchanzu, fief des rebelles du M23.
De Goma à Tchanzu, en passant par les localités de Kibumba, Kanyarucinya, Rugari, Rumangabo, Chengerero (dans le territoire de Rutshuru), pas une seule barrière sur une route en état de délabrement très avancé. Pas un pas sans un militaire Fardc. Les abords de la route présentent les stigmates d’une destruction méchante. Ce sont soit, des toits des maisons partiellement endommagés par des obus, soit des maisons complètement détruites par les mêmes engins. Au passage du cortège, les populations autochtones sont incapables de se contenir. Toutes manifestaient leur joie. Signe d’une paix retrouvée. Après quelque trois heures d’un parcours éprouvant à cause du mauvais état de la route, la délégation conduite par le Gouv du Nord-Kivu, Julien Paluku, arrive à Chengerero. Ici, les autochtones, alertés par l’atterrissage des deux hélicos de la Monusco, sont sortis de leurs cases pour envahir le pourtour du « petit-aérodrome » de Chengerero. Pas de cérémonie particulière. Un seul acte : la présentation d’une Land-Rover de l’armée rwandaise à la mission partie de Kinshasa. Il s’agit d’une jeep encore en bon état que les soldats Fardc avaient récupérée le mercredi 6 novembre sur la colline de Runyonyi.
UN OBUSIER 122 POSTE EN DIRECTION DE BUNAGANA
L’escale de Chengerero est plutôt courte. Après une trentaine de minutes, le cortège poursuit son bonhomme de chemin. Direction : La colline de Tchanzu. Il est presque midi. La mission arrive finalement au pied de la colline de Tchanzu. De cet endroit, on peut facilement apercevoir le « château » de Sultani Makenga, construit au sommet d’une montagne d’environ 1,5Km d’hauteur. C’est ici que commence horreur et étonnement. Horreur pour les journalistes et étonnement pour les militaires. Non sans raison. C’est donc à l’entame de cette colline de Tchanzu que les hommes de Makenga Sultani ont posé la plus grosse arme de leur mouvement. Selon le général Bahuma, Commandant de la VIIIème Région militaire, il s’agit d’un Obusier 122 nouvelle version, qui tire à une portée de 20 à 22 Km. « C’est avec cette arme lourde que les rebelles ont attaqué la cité de Bunagana et les localités de Kitchanga, Jomba et Chengerero », explique ce chef de corps.
Tout autour de cet engin de la mort, des obus non encore désamorcés sont perceptibles au sol. D’autres par contre, sont bien en place dans deux des trois poches de cette arme de la mort. Militaires et civiles, sont tous invités à la prudence. Mais le danger semble être bien loin derrière les membres de la mission. Si les journalistes se contentaient de prendre de petites notes, les conseillers de défense militaires, les délégués du Mécanisme conjoint de vérification (MCV) eux, notaient les différentes mentions reprises sur les armes trouvées sur place. Question de se faire une idée sur le pays d’origine de cet Obusier. Pour sûr, cet engin vient de quelque part. « Notre armée n’a même pas ce genre d’arme », précise le général Bahuma.
Après quelque 30 minutes, le cortège doit affronter le pic de la montagne de Tchanzu. Près de 2000 mètres d’altitude par marche sur un sol argileux. L’exercice ressemble à un véritable test d’aptitude physique pour des jeunes recrus. Et donc voilà. On y arrive. Le climat est maussade. Un drapeau pimpant neuf de la RD Congo, flotte sur un mât en bambous de chine, piqué devant l’ancien Bunker sans toiture de Sultani Makenga. Le décor renseigne suffisamment sur la débandade des éléments d’un mouvement rebelle qui n’ont pas pu résister à la puissance du feu des Fardc. On se croirait dans un champ brûlé. Pourtant.
MITRAILLEUSES, YANA, CAISSES DE MUNITIONS
Au sommet de la colline de Tchanzu, l’émotion de la mission augmente. C’est donc ce lieu qui constituait le Quartier général de l’ex-rébellion. On y trouve un Bunker plein de munitions. La résidence de l’ancien chef rebelle est entourée de plusieurs autres caches d’armes. Ce sont des caisses contenant des bombes, des roquettes et autres munitions. Pas seulement ça. Le dispositif de la mort comporte aussi deux Mitrailleuses dont une Anti Aérienne (MAA). Des Yanas 8 canons ainsi que d’importantes armes moyennes viennent ainsi allonger la liste déjà longue de l’équipement militaire du M23.
Tout autour de la bâtisse en ruine, des militaires Fardc, requinqués par leur victoire sur le mouvement armé M23, ne cachent plus leur satisfaction. Mais surtout leur détermination à défendre l’intégrité du territoire national. Ce, au prix du sacrifice suprême. Ce sont, pour la plupart, des soldats kinois et d’autres venus des deux provinces du Kasaï. En signe de colère, un groupe de vaillants soldats Fardc n’a pas hésité d’envoyer le chien gardien de Sultani Makenga dans la casserole.
Un autre constat, c’est qu’en plus des caches d’armes et munitions brûlées, le M23 a détruit, par le même mécanisme, tous ses véhicules. La jeep de Makenga ainsi que celles de son cortège ont été totalement brûlées. « Nous attendons que ce fou revienne. Nous nous demandons par où Makenga et ses hommes vont entrer pour une nouvelle tentative de couper notre pays. Ils ont tué nos parents, nos frères et nos sœurs. Nous avons le moral. Plus jamais alors, une telle tentative de balkanisation de notre pays ne saurait réussir », a déclaré à Forum des As, un soldat interrogé au front désormais inactif de Tchanzu.
300 SOLDATS M23 PRISONNIERS DE GUERRE A KANYARUCHINYA
Le vendredi 8 novembre en début de matinée, journalistes, ambassadeurs, délégués du Mécanisme conjoint de suivi, officiers et soldats de la Monusco s’étaient rendus à Kanyaruchinya, localité située à près de 6 Km de Goma. Ici, ce ne sont plus des armes qui sont présentées à la délégation. Plutôt, un groupe de 300 soldats dont des officiers militaires et de la Police du M23. Le groupe, majoritairement constitué de jeunes rwandais comprend également quatre rebelles d’origine ougandaise.
A tous égards, les différentes découvertes au front Est sont plus que révélatrices. Qu’il s’agisse des armes abandonnées ou des hommes de troupes, le tout tranche en faveur d’un soutien irréfutable du Rwanda au M23. A quelque chose, malheur étant bon ; il a fallu peut-être que cette énième guerre de trop se déclenche dans l’Est du pays, pour que le monde entier comprenne finalement le plan de balkanisation du pays, concocté par le Rwanda et l’Ouganda. Avec 300 tonnes d’armes et munitions découvertes à Tchanzu et 300 soldats en capitulation à Kanyaruchinya, Sulutani Makenga confond Paul Kagame. Malgré lui. De retour de Goma,
[Laurel KANKOLE/ForumDesAs]